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Fichiers personnels, charte informatique et licenciement

Fichiers personnels, charte informatique et licenciement
3 avril 2018 Elisabeth Graëve

La consultation par l’employeur de fichiers contenus dans un disque dur dénommé « données personnelles » constitue une ingérence dans le droit au respect de la vie privée d’un agent licencié. Toutefois, cette ingérence n’est pas contraire aux dispositions légales et à l’article 8 de la CEDH si elle poursuit un but légitime et qu’elle constitue une mesure nécessaire pour l’entreprise (CEDH, 22 février 2018, n°588/13, Libert c/ France).

En l’espèce, un cadre de la SNCF est suspendu de ses fonctions suite à sa mise en examen pour dénonciation calomnieuse.

Un non-lieu est prononcé et l’agent réintègre ses fonctions.

Il constate néanmoins lors de son retour que son ordinateur a été saisi, son remplaçant ayant trouvé sur son disque dur des fichiers à caractère pornographique et des attestations de complaisance destinées à des tiers, ce qu’il a signalé à sa hiérarchie.

L’agent est licencié aux motifs que ces faits sont contraires :

  • À l’obligation d’exemplarité particulière liée à ses fonctions de cadre
  • Aux dispositions internes à la SNCF, notamment à la charte des systèmes d’information

L’agent engage une action devant le CPH et soutient notamment que son employeur n’était pas en droit de consulter les fichiers informatiques identifiés comme personnels présents sur son ordinateur.

La Cour de cassation rejette ce moyen dans une décision du 4 juillet 2012 et juge que :

  • La dénomination donnée par le salarié au disque dur de son ordinateur professionnel ne peut conférer un caractère personnel à l’intégralité des données qu’il contient
  • Le licenciement est fondé dès lors que l’agent a fait un usage abusif et contraire aux règles en vigueur au sein de l’entreprise de son ordinateur professionnel

L’agent décide de saisir la CEDH et invoque l’article 8 de la CEDH et le non-respect de sa vie privée.

La CEDH juge qu’il y a effectivement eu ingérence de la SNCF dans la vie privée de l’agent mais que cette ingérence était justifiée car la SNCF :

  • Avait un intérêt légitime à assurer le bon fonctionnement de l’entreprise
  • Pouvait légitimement vouloir s’assurer que ses salariés utilisaient les équipements informatiques mis à leur disposition en conformité avec leurs obligations contractuelles et la réglementation applicable

La CEDH rejette donc le recours du salarié et ajoute :

  • que la charte d’utilisateur pour l’usage du système d’information de la SNCF indiquait expressément que les informations à caractère privé devaient être clairement identifiées comme telles (option « privé » dans les critères Outlook), ce qu’il n’avait pas fait
  • que le salarié avait utilisé une partie très importante des capacités de son ordinateur professionnel pour stocker les fichiers en cause